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Session de questions-réponses avec Max Kirsch : anthropologie, droits de l’homme et développement des cours de l’IB (deuxième partie)

Le nouveau cours de politique mondiale a été introduit en 2014. À cette occasion, l’IB avait demandé à Max Kirsch, examinateur du cours pilote, d’expliquer en quoi cette matière était aussi importante et dynamique. Dans la seconde partie de cet entretien, M. Kirsch en dévoile davantage sur la nature du nouveau cours.

MaxMax Kirsch est professeur d’anthropologie et président des droits de l’homme et des droits culturels pour l’UNESCO à l’Université Atlantique de Floride. Il a également enseigné à l’Université de New York et à l’Oberlin College, en plus d’avoir assuré la fonction de doyen adjoint pour la Graduate Faculty of Political and Social Science à la New School for Social Research, à New York. L’Oxford University Press publiera son volume d’accompagnement pour le nouveau cours de  proposé à tous les établissements scolaires à partir de 2015.

Quelle est la nature du cours de politique mondiale ? 



En politique mondiale, une question politique est toute question d’interaction mondiale permettant ou exigeant un examen critique, ou y invitant. Ces questions remplissent les agendas des politiciens et des décideurs, occupent les esprits des directeurs d’entreprises mondiales comme des entrepreneurs sociaux locaux, font l’objet de discussions dans les actualités ou autour d’une tasse de café, motivent l’art, sont profondément ancrées dans l’histoire et la culture et tiennent une place importante dans nos interactions quotidiennes. Elles sont essentielles pour le thème central commun du cours de politique mondiale (les hommes, le pouvoir et la politique) puisqu’elles révèlent la façon dont le pouvoir est distribué et fonctionne dans une organisation sociale, ainsi que la façon dont chacun envisage sa communauté et le monde, et s’investit dans les questions qui ont une influence sur son bien-être, ou mal-être, notamment sa survie.

Les questions politiques sont présentes à tous les niveaux de la politique mondiale. Prenons l’exemple du changement climatique : ce sujet permet de soulever des questions politiques aux niveaux mondial, international, régional, national, local et communautaire. Au niveau mondial, la question politique pourrait porter sur le fait que la capacité restreinte des Nations Unies à appliquer une mesure juridiquement contraignante pour tous les États membres empêche le monde entier de progresser dans la lutte contre le changement climatique. Au niveau international, la question politique pourrait porter sur le fait que de nombreux pays en développement ont déjà ressenti l’influence du changement climatique sur leur position dans les négociations internationales sur le climat. Au niveau régional, la question politique pourrait porter sur les difficultés que l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) a rencontrées lors de la formulation d’une politique commune sur le climat. Au niveau national, elle pourrait porter sur l’incidence d’un typhon particulièrement dévastateur aux Philippines sur les décisions et les politiques du gouvernement central en matière de prévention des catastrophes naturelles. Au niveau local, elle pourrait explorer de quelles façons le typhon qui a récemment frappé l’île de Leyte aux Philippines a entraîné la dépendance des habitants à l’aide extérieure et, par conséquent, modifié la dynamique de la société en matière de pouvoir. Enfin, au niveau communautaire, la question pourrait porter sur les mécanismes en place et explorer dans quelle mesure un groupe d’émigrants philippins particulièrement actifs peuvent changer la vie de leur famille et de leurs proches après une catastrophe naturelle aux Philippines.

Le cours de politique mondiale part du principe que les actions des hommes, le pouvoir et la politique constituent une ressource productive pour observer et analyser les changements dans le monde. Ensemble, ces éléments forment un tout intégré qui ne constitue pas un bloc, mais sert de point de départ pour discuter et analyser la façon dont le monde a évolué et dont il pourrait continuer d’évoluer à l’avenir. Le cours a été conçu de façon à ce que les enseignants et les élèves puissent explorer leurs propres intérêts et ceux qui pourraient apparaître avec le temps.

Quelles difficultés l’approche fondée sur des concepts du cours de politique mondiale comporte-t-elle pour les enseignants et les élèves ? 



Je ne pense pas que l’approche fondée sur des concepts présente des difficultés particulières pour les enseignants et les élèves. Elle a été développée pour fournir des concepts et des suggestions pour l’utilisation d’exemples et d’études de cas qui peuvent être adaptés aux intérêts spécifiques des enseignants et des élèves. Elle permet aux enseignants et aux élèves d’appliquer leurs propres connaissances et de présenter de façon créative des exemples familiers. Elle favorise également la synthèse. Les concepts sont abstraits tandis que les études de cas sont concrètes. Les études de cas illustrent les concepts. Elles sont présentes tout au long du programme afin de concrétiser la nature abstraite des concepts, de façon à ce que les élèves puissent visualiser un concept dans un contexte particulier. Dans certains domaines, il se peut qu’aucune étude de cas ne soit nécessaire, alors que dans d’autres il pourrait y en avoir plus d’une. Par exemple, dans une étude de cas sur les changements en matière de pollution à l’échelle internationale, l’enseignant peut décider d’inclure les changements locaux afin d’illustrer comment ces derniers sont liés au niveau mondial. Il peut ainsi rendre ce sujet particulièrement pertinent pour les élèves étudiant la pollution industrielle, par exemple, et les débats autour de son accroissement dans les pays en développement.

Les concepts sélectionnés pour le cours ainsi que les quatre unités qui le composent (relations internationales, droits de l’homme, développement, paix et conflits) fournissent un vaste cadre de travail pour étudier toute une gamme de définitions et d’idées en lien avec le monde actuel. Ils permettent également d’intégrer l’exploration multidisciplinaire d’événements et de questions, alors qu’une matière élaborée de façon traditionnelle risquerait de les décourager. D’autres matières de l’IB sont actuellement en cours de révision pour intégrer une approche fondée sur des concepts, alors que la scène disciplinaire est en rapide évolution. Nous aimons penser que nous avons peut-être lancé une tendance qui élargira et approfondira l’apprentissage et l’évaluation des élèves. En effet, elle permet d’intégrer les contributions et les analyses des enseignants et des élèves tout en encourageant la présentation de leurs points de vue.

Quel est le principal aspect du cours de politique mondiale que vous souhaitez que les élèves retiennent ?

Nous aimerions que les élèves comprennent que la politique a changé, qu’elle occupe une part importante de notre quotidien et qu’il est primordial de s’engager pour créer un monde meilleur. Les élèves ont un rôle déterminant à jouer dans leur propre développement et dans celui de la société. Le concept de société civile est central, il illustre la participation des citoyens dans l’élaboration de leur avenir. Nous avons des droits et des devoirs à chaque niveau géographique. De même, des organisations extérieures à la structure gouvernementale officielle peuvent déterminer l’évolution de nos vies futures. Le concept de société civile remonte au début du XIIIe siècle. Il décrivait alors la transition d’une économie des ménages fondée sur le système féodal à des relations d’échange de biens dans l’espace public. Aujourd’hui, cette expression est utilisée pour désigner la sphère publique qui échappe au contrôle des forces réglementaires et les mouvements de revendication de l’action dans l’organisation sociale. Notre cours de politique mondiale suit cela de près, du niveau géographique mondial et international jusqu’à la participation et aux actions locales et individuelles.

Dans mes cours, mes élèves me demandent souvent s’il y a de l’espoir pour l’avenir, compte tenu du déluge de crises quotidiennes retransmises par les nouvelles technologies de communication et du lot quotidien de difficultés parfois insurmontables auxquelles sont confrontées les personnes. Je leur réponds que tout dépend d’eux : il y a très peu de place pour l’apathie dans le monde d’aujourd’hui, et il est indispensable de participer et de s’engager si nous voulons construire un monde qui prend en compte les besoins de la majorité et non les désirs de quelques privilégiés. Nous devons lutter sans relâche pour que l’humanité parvienne à un système mondial coopératif, en harmonie avec la nature. Nous espérons que le cours de politique mondiale permettra aux élèves de comprendre cela.

Lire la première partie de cet entretien (en anglais uniquement).