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Discussion sur la protection de l’enfance dans les écoles internationales

Baby Care Vector Symbol, Family ConceptL’International Task Force on Child Protection (groupe de travail international sur la protection de l’enfance, ITFCP) a été applaudi lors de la récente conférence de l’IB en Afrique, Europe et Moyen-Orient pour son formidable travail sur la protection des enfants dans les écoles internationales. Jane Larsson, présidente du groupe de travail et directrice exécutive du Council of International Schools (CIS), explique au magazine IB World pourquoi la communauté des écoles internationales est particulièrement exposée à la violence à l’égard des enfants.

Tous les enfants devraient se sentir en sécurité dans leur établissement scolaire. Pourtant, au Royaume-Uni seulement, au moins 959 enseignants et autres membres du personnel scolaire (en anglais) ont été accusés de violence à l’égard des enfants entre 2008 et 2013.

Si aucune statistique n’est disponible concernant les violences à l’égard des enfants dans les écoles internationales, la facilité de mobilité des enseignants internationaux, associée à des pratiques de recrutement insuffisantes et à des systèmes juridiques sous-développés dans certains pays, peuvent faire de ces établissements des cibles de choix pour les agresseurs d’enfants, a déclaré Jane Larsson, directrice exécutive du Council of International Schools (CIS).

L’International Task Force on Child Protection (ITFCP) a été constituée en avril 2014 par six organisations internationales dans le but de former les dirigeants et les enseignants aux défis associés à la protection de l’enfance dans les écoles internationales. Cette formation couvre l’ensemble des cas de violence, y compris les agressions sexuelles perpétrées par des enfants sur d’autres enfants. Le groupe de travail, une coalition de plus de 90 bénévoles dans 40 pays, regroupe des dirigeants d’organisations d’éducation internationale, des chefs d’établissement, des conseillers et des enseignants, qui travaillent en étroite collaboration entre les professions avec des responsables de l’application de la loi et la communauté médicale.

« Très tôt, le groupe de travail a constaté que de nombreux individus mus par l’intention d’abuser des enfants recherchent des pays disposant d’un système juridique sous-développé et d’établissements peu susceptibles de vérifier leurs antécédents. Lorsque nous nous sommes rendu compte de l’extrême vulnérabilité de la communauté des écoles internationales, nous avons structuré notre travail de façon à trouver des solutions à ces difficultés uniques. En menant des recherches sur les pratiques de recrutement, nous avons découvert que de nombreux établissements ne vérifiaient pas les références du nouveau personnel », a déclaré Mme Larsson.

Former les professionnels de l’éducation

Auparavant, les écoles internationales ne disposaient pas de normes exhaustives concernant la protection des enfants. Grâce au groupe de travail, Jane Larsson et son équipe du CIS ont établi des partenariats avec l’IB, les agences d’inspection du Royaume-Uni qui travaillent avec les établissements britanniques dans le monde entier, ainsi que les agences des États-Unis chargées de l’accréditation des écoles internationales américaines pour remédier à cette lacune.

Nous nous sommes réunis et avons examiné les normes actuelles, qui étaient insuffisantes. Aujourd’hui, nous sommes très fiers d’être parvenus à ce que chacune de ces agences ait accepté de renforcer les normes à un niveau qui nous semble approprié pour aider les établissements à protéger les enfants, a expliqué Mme Larsson.

Ces normes couvrent la gestion des crises, la sélection du personnel, la détection et le signalement des violences, la formation et le soutien proposés aux dirigeants, aux enseignants et aux élèves en matière de comportements et de limites, la mise en œuvre de politiques et la collaboration avec la communauté locale. Toutefois, pour satisfaire à ces normes, les professionnels de l’éducation doivent d’abord comprendre en quoi consiste la protection de l’enfance et leur rôle dans l’identification des violences.

Siva Kumari, la directrice générale de l’IB, signe les recommandations de l’ITFCP

Siva Kumari, la directrice générale de l’IB, signe les recommandations de l’ITFCP

Une étude de l’IFTCP réalisée en 2015 auprès de 700 professionnels de l’éducation internationale a révélé que pour 90 % d’entre eux, la formation en matière de protection de l’enfance est insuffisante et devrait avoir lieu régulièrement. Le groupe de travail s’est associé avec des experts et a commencé à compiler des ressources pour répondre à ce problème de formation. Il a établi un partenariat avec l’International Centre for Missing and Exploited Children (centre international pour les enfants disparus et exploités, ICMEC) et a lancé en octobre dernier un nouveau portail consacré à l’éducation. Les communautés d’écoles internationales peuvent y partager et charger des ressources de formation, tandis que les parents et les enfants peuvent y trouver des informations utiles.

« Nous étions conscients que nous ne pouvions pas nous limiter à imposer de nouvelles normes », a déclaré Mme Larsson. « Nous avons l’obligation morale de fournir des ressources de formation aux établissements de façon à ce qu’ils puissent satisfaire à ces normes. »

L’ITFCP a abordé les pratiques de recrutement insuffisantes dans les établissements, et le CIS montre l’exemple. Désormais, chaque enseignant qui présente une candidature à son service de recrutement doit obtenir une vérification de ses antécédents dans chaque pays dans lequel il a travaillé. Cela peut s’avérer difficile pour les personnes mobiles à l’échelle internationale. Dans certains pays, c’est même presque impossible. Pour les aider, l’ITFCP a compilé un document de 200 pages fournissant aux professionnels de l’éducation la marche à suivre pour obtenir une vérification de leurs antécédents dans chaque pays.

« Nous avons partagé ce document avec Interpol, qui est disposée à s’en servir pour aider les pays à pallier l’insuffisance de leur système de vérification des antécédents. Aujourd’hui, une nouvelle initiative est en place pour créer un certificat de police international (en anglais) unique permettant à l’ensemble des 190 pays membres d’Interpol de partager des informations. Il sera bien plus facile pour les professionnels de l’éducation internationale d’obtenir une vérification de leurs antécédents », a expliqué Jane Larsson.

Lever le voile

La nature inclusive des communautés d’écoles internationales dissuade parfois les professionnels de l’éducation de faire part de leurs soupçons. Il est nécessaire d’instaurer une discussion ouverte et honnête, a déclaré Mme Larsson : « Trop souvent, un « voile » est jeté sur les agressions sexuelles et la peur empêche de les dénoncer. Les professionnels de l’éducation ont peur de se tromper, ou de détruire la carrière de leur collègue, ou la réputation de l’établissement, voire de le faire fermer. »

Cependant, ce n’est pas le travail du professionnel de l’éducation d’enquêter sur les crimes contre les enfants. « C’est le travail des autorités chargées de l’application de la loi », a déclaré Jane Larsson. « Malgré cela, nous avons découvert que de nombreux chefs d’établissement ne connaissent pas les lois en vigueur dans les pays dans lesquels ils travaillent et qu’ils n’ont pas non plus rencontré les forces de l’ordre locales. »

Jane Larsson invite les établissements scolaires à travailler en collaboration avec leurs communautés locales.

« Nous encourageons la communauté des écoles internationales à établir des relations avec les experts locaux, les forces de l’ordre ou d’autres personnes qui seraient capables et désireuses d’aider, et à laisser les experts faire leur travail d’enquête une fois qu’une agression est suspectée ou établie. »

Si les violences ne sont pas signalées, le même schéma est susceptible de se reproduire dans un autre endroit, comme l’a découvert Mme Larsson : « À maintes reprises, nous avons constaté que les agresseurs travaillaient dans des établissements scolaires et que leurs collègues avaient des soupçons, mais n’étaient pas assez courageux pour les signaler. Les agresseurs quittaient ensuite l’établissement pour en intégrer un nouveau, puis reproduisaient le même comportement sans se faire découvrir. »

Davantage de travail doit être effectué

L’ITFCP a accompli des progrès considérables pour ce qui est d’attirer l’attention des établissements scolaires sur le thème de la protection de l’enfance et de former la communauté d’écoles internationales. Toutefois, ce thème doit encore être davantage reconnu, a déclaré Mme Larsson. Elle prend la parole jusqu’à quatre fois par an pour aborder ce sujet et continue d’être surprise par le manque de participation des professionnels de l’éducation qui ratent une occasion d’en apprendre davantage : « C’est un thème difficile pour de nombreuses personnes, mais nous devons nous renseigner sur le sujet. »

« Des formations en ligne sont disponibles, mais nous voulons élaborer un projet international davantage pertinent pour les communautés qui doivent connaître les systèmes disponibles dans leur pays. Nous voulons aussi les aider à aborder les différences culturelles auxquelles elles se heurtent en cas de violence. Nous n’essayons pas de réinventer la roue, mais de l’internationaliser », a expliqué Mme Larsson.

Pour obtenir de plus amples informations sur l’ITFCP, rendez-vous sur les sites Web suivants : http://www.cois.org (en anglais uniquement) ou http://www.icmec.org/.

Le deuxième article de la série abordera les signaux d’alarme et la façon de déceler la violence dans les établissements.

Les conseils de Jane Larsson pour les écoles du monde de l’IB :

  • menez des recherches sur les ressources disponibles ;
  • participez à des formations ;
  • invitez des experts dans les communautés.

Pour protéger les enfants :

  • écoutez-les ;
  • soutenez-les ;
  • croyez-les ;
  • trouvez un expert pour enquêter immédiatement : il peut être nuisible pour un enfant de raconter son histoire à plusieurs reprises à une personne qui n’est pas formée pour mener l’entretien.